Jean-Michel s. 31 mai 2025 21:12
la thèse de Frédéric Sabater Pastor (2021), compare (entre autres) les caractéristiques des coureurs élite sur route et en trail sur des critères majeurs : économie de course, force, puissance, biomécanique.
https://pubmed.ncbi.nlm.nih.gov/36515604/
Les résultats sont éclairants :
Si les profils sont bien distincts, les passerelles d’entraînement sont possibles.
Résultats majeurs :
Profil Force–Vitesse (F–V)
Les traileurs présentent une meilleure puissance maximale (Pmax) lors de l’évaluation du profil Force-Vitesse. Leur profil neuromusculaire est davantage orienté vers le côté force : autrement dit, ils sont bons à produire de la force à vitesse assez lente !
L'Économie de course (RE)
À 10 km/h (zone d’endurance fondamentale) :
→ Les coureurs route présentent une RE similaires aux trailers avec une legère tendance à être plus économique.
À 14 km/h :
→ L’écart s’accentue : les routiers conservent un rendement élevé, tandis que les trailers présentent une hausse significative de la consommation d’oxygène.
→ Cela suggère une moindre capacité à soutenir des vitesses stables sur le plat.
RE en montée (10 % à 10 km/h)
→ Aucune différence significative n’a été observée entre les deux groupes.
Ce résultat est particulièrement intéressant : les routards et les trailers affichent un coût énergétique similaire lorsqu’ils courent en montée modérée.
Cela suggère que les adaptations liées au trail ne confèrent pas nécessairement un avantage sur les montées “modérées”, mais plutôt sur les sections plus techniques ou irrégulières (non testées ici).
L’absence de différence sur une montée à 10 % ne remet pas en cause les adaptations spécifiques du trail, mais souligne plutôt que les tests standardisés en laboratoire sous-estiment la réalité du terrain. Il serait bien plus pertinent d’explorer des inclinaisons supérieures (>15 %) pour capturer une différence....
RE en montée (>20 %)
Pour aller un peu plus loin, il peut être intéressant de se pencher sur la relation entre l’économie de course sur le plat et celle observée sur différentes inclinaisons, telle qu’explorée dans l’étude de Lemire et al. :
https://www.frontiersin.org/journals/physiology/articles/10.3389/fphys.2021.697315/full
. Le cout énergétique (l'économie) à plat (level running, LR) est corrélé au cout énergétique en montée (Uphill running ou UR) jusqu'à 15% de pente.
Au delà (20%), ce n'est pas le cas.
Sur des pentes très raides, les mécanismes énergétiques de la course sont déterminés par des facteurs différents (réduction du mécanisme de rebond et une compensation par beaucoup de travail cardiopulmonaire) par rapport aux pentes moins raides.
Conclusion :
→Les traileurs sont plus puissants et ça vient majoritairement d'une plus grande force.
→A vitesse très basse (10km/h), les traileurs sont aussi économes que les coureurs route à plat.
→A 14km/h, les coureurs routes sont plus économes.
→Sur des pentes modérées (10%), aucunes différences entre nos deux types d'athlètes.
→L'économie à plat semble relativement bien corrélé à l'économie en montée jusqu'à 20% de pente. Au delà, ce n'est plus le cas et ça demande un travail spécifique !
Intégrer le plat dans une logique trail : 2 stratégies.
1- Faire du plat pour être bon en montée ? OUI !
À moins de situations particulières où la marche prédomine (profil très raide), avoir une bonne économie de course sur terrain plat reste un atout pour performer sur les sentiers. Réaliser des entrainements à plat ou sur gradients très modérés sera un avantage majeur.
Ça donnera de la "flexibilité" au traileur quand il devra progresser sur des gradients jusqu'à 10-15%.
Cela dit, il semble pertinent de conserver le travail du SV1 et du début de zone tempo sur terrain plat, où l'économie est maximisée et de réserver les intensités plus élevées (VO₂max, seuil) aux terrains plus spécifiques — chemins, côtes, sentiers — afin d’habituer l’organisme aux contraintes techniques et musculaires du trail.
2- Etre spécifique sur l'entrainement >15% de pente.
A 15-20%, on se situe généralement autour de la transition course-marche. Ce secteur est spécifique et doit être entrainé spécifiquement. Sur ces pourcentages de pente, il est pertinent d’alterner des séances à haute intensité — souvent sous forme de blocs en course-marche — et des séances à basse intensité, réalisées majoritairement en marche. Dans ce contexte, le recours aux bâtons est non seulement pertinent mais généralement recommandé, tant pour l’efficacité mécanique que pour la gestion de la fatigue.